Affaire de la famille Paye : Violence Psychologique, Statut Social, Dette Affective et Préméditation

mai 10, 2025
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Un soir de novembre 2021, le Dr Falla Paye a mis fin à ses jours après avoir tué ses trois enfants. Dans une lettre posthume de dix pages, il tente de justifier l’irréparable en chargeant son ex-épouse. Ce décryptage propose une lecture critique du discours relayé par plusieurs médias, révélateur de schémas classiques de violence psychologique, de domination symbolique et de manipulation affective.

Violence psychologique : une tragédie invisible

D’après les résumés publiés par Dakaractu (2021) et EnquêtePlus (2021), le Dr Paye décrit quinze ans de vie conjugale marquée par ce qu’il perçoit comme de la froideur, de l’humiliation et du rejet. Il évoque notamment des périodes prolongées d’abstinence sexuelle et un « mariage par défaut ». Ce type de discours, où l’on attribue à l’autre la responsabilité exclusive de l’échec conjugal, est caractéristique de la violence psychologique. Celle-ci ne laisse pas de traces physiques, mais déstructure la victime, l’isole et détruit son estime de soi (SeneNews, 2021; Actionenfance.org, 2025).

Le statut social : levier d’impunité symbolique

La posture du Dr Paye, médecin-dentiste respecté, a conféré à son récit une autorité implicite. Plusieurs médias ont relayé le contenu de sa lettre avec peu de recul critique, renforçant ainsi la crédibilité de ses accusations. Cette dynamique est fréquente dans les contextes patriarcaux, où les figures d’autorité masculine voient leur parole survalorisée (Canada.ca, 2008).

Reproches et dette affective : une stratégie de domination

Toujours selon les extraits rapportés, le Dr Paye reproche à son épouse de lui devoir son ascension sociale, évoquant les moyens financiers qu’il aurait mis à sa disposition et le soutien moral qu’il lui aurait apporté (Dakaractu, 2021 ; SeneNews, 2021). Ce mécanisme, connu sous le nom de dette affective, constitue une forme subtile de domination psychologique, où l’autre est sommé de « rendre » ce qu’on lui a donné, affectivement ou matériellement (Justifit.fr, 2025).

Préméditation : un acte calculé

La structure de la lettre, telle que décrite par les médias (EnquêtePlus, 2021), laisse entrevoir une organisation méticuleuse. Le Dr Paye y retrace les étapes de son geste, explique son intention de ne pas laisser de « descendance issue d’un mariage sans amour » et évoque la préparation de sa propre mort. Cette planification est typique de la préméditation, définie juridiquement comme un dessein formé avant l’action (J.P. Louton Avocat, 2024).

Transfert de culpabilité : réécriture posthume

Plusieurs sources indiquent que la lettre se termine par des accusations directes envers Awa Diagne, présentée comme insensible, voire incapable d’aimer ses enfants. Ce type de récit, qui transfère symboliquement la responsabilité du drame sur la victime survivante, relève du « terrorisme intime » : un usage posthume de la culpabilisation pour détruire l’autre sans confrontation (Canada.ca, 2008).

Dire ce que les lettres ne disent pas

J’ai lu cette lettre. Et ce que j’ai perçu, ce n’est pas un cri de souffrance brute, mais un récit structuré, orienté, où l’auteur tente de se justifier en effaçant l’autre.

Ce drame m’a profondément bouleversée. Il m’a rappelé que la violence psychologique ne se voit pas toujours, mais qu’elle peut être aussi meurtrière que les coups. Qu’un récit posthume, quand il est repris sans esprit critique, peut devenir un outil d’effacement.

Je crois qu’écrire, décrypter, c’est aussi une manière de résister à ces récits imposés. Mon engagement est clair : mettre en lumière les formes de violences passées sous silence, et refuser que la voix des survivantes soit étouffée par la mort des autres. Ce n’est pas juste une affaire tragique, c’est une alerte sur la manière dont on parle — ou pas — de ce que subissent les femmes.

Maintenant que nous avons exploré différents types de violences faites aux femmes, qu’elles soient physiques ou psychologiques, et les mécanismes qui les entretiennent, plongeons-nous dans le système judiciaire sénégalais pour comprendre comment elles peuvent perdurer. Pour en savoir plus, je vous invite à lire le prochain article. 

Sources :
Mes décryptages